25 décembre 2007

Les municipales auront raison du pouvoir d'achat

La prestation de Nicolas Sarkozy sur le pouvoir d’achat n’a guère convaincu les milieux économiques et financiers. Déjà, au sein de la cour – tellement élargie qu’on y trouvait même Hugues Gall, l’ancien directeur de l’Opéra de Paris, un proche – qui l’accompagnait à Pékin, des remarques ont commencé à se faire entendre sur le caractère à la fois hâtif et brutal de ses décisions. Tout est dans la communication, bien sûr, mais le résultat concret se fait attendre. La croissance de cette année sera probablement de 1 point en dessous de celle de l’Allemagne et, à part le Portugal, aucun pays de la zone euro ne fera pire que la France. Et les décisions annoncées sur le pouvoir d’achat ont confirmé une certaine incohérence dans la façon de mener la politique économique.

Déjà, dans l’entourage de Sarkozy, deux clans s’affrontent. Les libéraux traditionnels, conduits par la jeune Emmanuelle Mignon, la directrice de cabinet de l’Elysée, qui ont eu peu d’impact encore sur la politique suivie. Malgré un renfort inattendu de Jacques Attali, ils ont du mal à se faire entendre. L’hostilité que Claude Guéant manifeste à l’égard d’Emmanuelle Mignon avait en fin d’été poussé celle-ci à laisser filtrer le bruit de sa démission. Guéant était plus proche du camp adverse qui s’incarne en Henri Guaino et Raymond Soubie. Ces derniers développent une vision économique faite de négociations marathon avec les syndicats, notamment ceux de la fonction publique, de déficit budgétaire et de politique industrielle industrialisante comme au bon vieux temps des années Pompidou. Depuis novembre, l’influent secrétaire général de l’Elysée est moins net dans ses opinions et le balancier paraît sur le point de partir dans l’autre sens. Dans l’affaire du pouvoir d’achat, Henri Guaino avait trouvé la solution miracle : baisser la TVA de façon à faire baisser les prix. Il proposait de revenir au taux d’avant les hausses Juppé de 1995, retour symbolique à la période d’avant la rigueur nécessaire au passage à la monnaie unique. Or Guaino n’a pas eu gain de cause et les alertes de Bercy sur le creusement du déficit budgétaire ont fini par faire reculer Sarkozy. Cet échec relatif de Guaino s’est doublé de l’annonce de la mort de l’Agence pour l’Innovation Industrielle, pur produit du « patriotisme économique » villepinesque qui fleurait bon l’économie mixte et les grands projets publics.

Les libéraux ont repris espoir et sentent que la politique d’austérité qu’ils préconisent pourra se mettre en place juste après les municipales. Il s’agira alors clairement, à la veille de la présidence française de l’Union européenne, de donner des gages à des partenaires de plus en plus agacés par la dérive des comptes publics français. Au passage, de plus en plus de voix dans la majorité s’élèvent pour réclamer un peu plus de courage politique, et que l’on cesse de monter des usines à gaz pour se défaire des 35 heures et de l’ISF. Quant au pouvoir d’achat, il sera emporté dans la rigueur post-municipale, comme la relance de 1981 le fut dans celle de 1983 ou comme la fracture sociale de 1995 s’est éteinte dans le discours de Chirac du 26 octobre de la même année. La seule question qui se pose est de savoir qui mènera cette rigueur à Bercy. Lagarde s’y voit mais il y a tellement de gens qui sont persuadés qu’ils feraient mieux. Quant à Sarkozy, il pense que ce n’est pas un vrai défi de faire mieux qu’elle…

Baisse des prix, augmentation du chômage

Pour lutter contre la baisse du pouvoir d’achat, il suffit de faire baisser les prix. Au début du mois, Nicolas Sarkozy a annoncé des mesures dans ce sens. L’idée est géniale. Elle se résume en quelques mots et semble imparable. De ce fait, elle trouve des supporters à la pelle, dans les médias ou ailleurs. Elle induit une solution manichéenne : il suffit de donner plus de pouvoir à la distribution pour faire baisser les prix des industriels.

Mais cette démonstration est trop courte pour être vraie sur le moyen terme, celui du trimestre pour les entreprises cotées. Si les prix de vente des industriels diminuent, que vont-ils faire ? Réduire leurs bénéfices ou réduire leur masse salariale ? Cette fois-ci, pas besoin d’ouvrir les paris. Les résultats sont devenus des contraintes pour les entreprises, elles ne diminueront pas leurs bénéfices. Comme les matières premières augmentent, elles réduiront leur masse salariale. Soit en réduisant les salaires : difficile. Soit en licenciant et délocalisant. On nous annonce une baisse des prix, nous aurons une augmentation du chômage. Merci qui ?


Sylvain